MOSSET, OLIVIER
* 5.11.1944 BERN
Maler.
Fils d’un ingénieur chimiste et petit-fils d’un industriel de l’horlogerie, Olivier Mosset entreprend des études classiques au Gymnase de Neuchâtel. Il s’intéresse déjà à la peinture et visite le 1er salon international de galeries-pilotes à Lausanne en 1963, où des œuvres de Lucio Del Pezzo, Alain Jacquet, Jasper Johns et Frank Stella retiennent son attention. Il rend visite à Jean Tinguely, à Paris, qui l’engage comme assistant. Ce dernier l’initie à l’œuvre de Marcel Duchamp mais aussi aux textes de Mikhaïl Bakounine, Max Stirner et Léon Trotski. Mosset s’installe réellement à Paris en 1965, après un retour momentané en Suisse pour obtenir une maturité fédérale. Il fréquente alors le cercle des Nouveaux réalistes, et assiste également Daniel Spoerri. Il peint, de son côté, des tableaux blancs avec des lettres, des chiffres ou des points. En 1966, il présente une toile avec deux «A» au Salon Comparaison au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris.
Le critique Otto Hahn lui achète l’un de ses premiers cercles noirs sur fond blanc – qu’il va désormais reproduire près de deux cent fois jusqu’en 1972. C’est par son intermédiaire qu’il rencontre le peintre Daniel Buren, puis Michel Parmentier et Niele Toroni qui forment le groupe B.M.P.T. en utilisant la première lettre de leur nom de famille. Ils organisent en 1967 quatre manifestations publiques où s’affirme de manière polémique leur volonté de rupture avec la peinture dominante (c’est-à-dire l’abstraction de l’Ecole de Paris et l’expressionisme abstrait), et leur ambition de recommencer la peinture à zéro. A l’occasion d’un bref séjour à New York, Mosset rencontre Andy Warhol et visite une exposition de Robert Ryman.
En 1968, sa collaboration avec B.M.P.T. a cessé. Il s’engage alors dans l’action politique de «Vive la Révolution», fréquente les motards des Hells Angels et réalise son Catalogue n°1 avec un entretien imaginaire du réalisateur Serge Bard, puis sa première exposition personnelle à la Galerie Rive Droite à Paris. En 1972 il entreprend les toiles à bandes verticales «empruntées» à Buren, qu’il expose à la Galerie Daniel Templon à Paris et à la Galerie Média à Neuchâtel. Pour la Biennale de Paris, en 1977, il peint une toile rouge aux dimensions du mur, dont on devine les tracés au crayon de bandes verticales. Cette œuvre amorce la série des monochromes, qui se prolonge jusqu’en 1986, mais dont les formats et la couleur ne cesseront de varier. C’est en 1980 que Les Editions Média publient les premières estampes de l’artiste dont quatre sérigraphies monochromes.
Mosset s’installe à New York en 1977 et partage un atelier sur Broadway avec le peintre suisse Grégoire Müller. Avec des artistes américains et européens – Marcia Hafif, Joseph Marioni, Phil Smith, Günther Umberg et Jerry Zeniuk – il participe à l’exposition New Abstraction à la galerie new-yorkaise Sidney Janis en 1983, puis l’année suivante à Radical Painting au Williams College Museum of Art de Williamstown. Sa première exposition rétrospective est présentée à Poitiers et à Châteauroux en France, au Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds en 1985, puis au Kunsthaus d’Aarau en 1986. Cette même année, à Genève, il participe à l’exposition Peinture abstraite à la Galerie Ecart et montre des compositions géométriques de grand format au Centre d’art contemporain. Il expose aussi avec John M Armleder et Helmut Federle à la Kunsthalle de Zurich. Son travail commence à être reconnu en Suisse et son influence devient manifeste sur une nouvelle génération d’artistes romands.
En 1989, il réalise sa première commande publique pour le bâtiment des télécommunications à Neuchâtel, une bande d’aluminum disposée en diagonale sur la façade. L’année suivante, il représente la Suisse à la Biennale de Venise. Après avoir introduit les «shaped canvas» dans sa peinture, il explore les relations entre peinture et sculpture. Invité régulièrement aux expositions de sculpture de Môtiers, il réalise des œuvres en trois dimensions à partir d’objets existants: tuyau en béton, cimaises blanches, rampe de skateboard, et ses fameux Toblerones – copies en carton des barrages anti-char suisses – présentés au Musée cantonal des beaux-arts de Sion en 1994, puis moulés ultérieurement en glace. En 1995–96, il dirige un atelier à l’Ecole supérieure d’art visuel de Genève (ESAV), puis s’installe à Tucson en Arizona. Il poursuit néanmoins ses activités en Suisse en intervenant à l’issue d’un concours en 2002, sur trois cents portes de la Bibliothèque nationale suisse à Berne.
En 2007, il lègue au Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds une collection d’œuvres de ses amis artistes suisses et américains tels que John M Armleder, Carl André, Sol Lewitt et Peter Halley. Multipliant les collaborations, il conçoit en 2012 pour la chorégraphe Marie-Agnès Gillot le décor de Sous Apparence, une création présentée à l’Opéra Garnier à Paris. Mosset systématise dès lors sa collaboration avec d’autres artistes, inaugurée dans les années 1990 avec John M Armleder et Steven Parrino. Olivier Mosset Collaborations est d’ailleurs le titre d’une exposition au Centre culturel suisse de Paris (2014). Voyageant dans le monde entier pour ses expositions, Mosset a deux points d’attache: son atelier de Tucson et sa ferme de Villiers (NE).
On peut distinguer plusieurs périodes dans l’œuvre de l’artiste, correspondant dans une certaine mesure aux différents lieux dans lesquels elle s’est développée. La première, celle des cercles, est liée au contexte parisien des années 1960; militante et situationniste, elle est centrée sur l’association B.M.P.T. Mosset trouve en effet dans la stratégie du groupe le cadre propice à sa recherche d’une peinture neutre, anonyme, relevant de cette esthétique de l’indifférence que prônaient John Cage et les artistes du pop art. Et par la répétition du même motif, il dénonce aussi les notions capitalistes et bourgeoises d’originalité, d’unicité et de nouveauté de l’œuvre d’art, mettant ainsi à nu son statut d’objet social et sa dimension politique.
A New York commence la deuxième période de l’artiste vouée essentiellement à la pratique du monochrome. Ainsi, comme pour les minimalistes, la dialectique interne du travail semble-t-elle l’emporter sur les circonstances extérieures, non seulement par le déploiement de la couleur et des formats, mais aussi par l’autonomie conquise de «la peinture qui n’est que peinture» – c’est à dire ni représentative ni métaphorique – et par l’affirmation de sa spécificité. Le retour à la peinture géométrique inaugure une troisième période de synthèse entre l’art américain et européen. En s’appropriant les conventions de l’abstraction, à l’instar du mouvement Néo-géo, en exploitant de nouveaux territoires comme la peinture-objet ou la sculpture ready-made, en donnant des titres à ses travaux, en collaborant avec d’autres artistes et en «recyclant» même leurs œuvres, Mosset rend manifeste la nature codée de l’œuvre d’art. Il tend ainsi à montrer que sa signification ne se trouve pas seulement dans son mode de fabrication ou de production, mais également dans la manière dont elle est perçue, interprétée et intégrée. De fait, la «littéralité» de l’œuvre et son «mutisme», qu’il tient avant tout à préserver, sont pour lui la manière la plus discrètement efficace de mettre en évidence ses rapports à l’histoire et au système de l’art.
SIKART Lexikon zur Kunst in der Schweiz
Edmond Charrière, 2014 https://www.sikart.ch/kuenstlerinnen.aspx?id=4002296
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OLIVIER MOSSET
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